La Sûreté de l’État (les services secrets belges) a pris des eurodéputés la main dans le sac après une invitation par Huawei à venir voir des matchs de foot. L’affaire baptisée "Huaweigate" concerne une enquête anticorruption.
Tout commence avec un acte a priori anodin : le géant chinois de la technologie Huawei réserve une loge VIP pour la saison au stade Lotto Park du Sporting d’Anderlecht, club de football de Jupiler Pro League situé à Bruxelles et participant à l’UEFA Europa League. Une location de 50.000 €. Logique, beaucoup d’entreprises font de même pour inviter des clients. Sauf que la Sûreté de l’État ne l’entendait pas de cette oreille. Les espions belges, mis au courant de la réservation, se disent alors que les conversations durant le match pourraient être intéressantes à écouter. La loge est alors visitée par des agents pour être truffée de micros.
Bonne pioche
Bingo ! Ils ont eu le nez fin. L’affaire est révélée par le média américain Politico. Elle permet de mieux comprendre les actions de la Justice belge quelques jours plus tôt. En effet, plusieurs eurodéputés sont dans le collimateur des tribunaux belges. Il semblerait que le groupe chinois tente d’influencer certains députés du Parlement européen. Il serait même question de corruption. Soit par le biais de gros chèques en fonction des décisions politiques, de cadeaux "démesurés" ou d’invitations à des voyages, restaurants et événements, dont des matchs entre Anderlecht et des équipes européennes. En tout cas, le Parquet fédéral belge a demandé la levée de l’immunité diplomatique de plusieurs parlementaires européens.
Corruption ou lobbying ?
Dans le dossier judiciaire, il y a les enregistrements du service d’espionnage belge. Ils auraient démontré que les conversations entre le lobbyiste de Huawei, un certain Valerio Ottati dont la voiture était également sous écoute, et ses invités visaient à "établir un premier contact avec les politiciens". Il devait ensuite essayer de les "graisser", à savoir de les couvrir de cadeaux de valeur tout en leur faisant la suggestion "d’oublier" de les déclarer. Car légalement tout présent de plus de 150 € reçu d’un député par un groupe de lobbys ou par une entreprise doit être déclaré.
Assistants zélés
Politico a donné deux noms : le Maltais Daniel Attard et le Bulgare Nikola Minchev. Deux autres eurodéputés, italiens, seraient également dans le collimateur de la justice belge. Daniel Attard a réagi en confirmant avoir assisté à un match de coupe d’Europe entre Anderlecht et les Hongrois de Ferencváros. Il se défend en indiquant qu’il ne connaissait pas l’origine de l’invitation proposée par son "assistant parlementaire hongrois" pour l’accompagner lui et son fils. Mêmes explications pour Nikola Minchev, pour le match entre l’équipe belge et les Bulgares de Ludogorets. Là aussi ce serait via un "assistant". La Justice devra déterminer leurs implications éventuelles dans ce dossier de corruption, ils restent donc présumés innocents pour l’instant.
(Olivier Duquesne – Sources : SudInfo, Le Soir & Politico – Picture : © picture alliance / Kirchner-Media | Kirchner-Media/Thomas Haesler)
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