Quand Stellantis attaque Tesla avec la Chinoise Leapmotor C10

Chez Stellantis (Peugeot, Citroën, Fiat, Opel…) on a déjà un catalogue varié de voitures électriques. Pourtant, le groupe s’est associé avec le Chinois Leapmotor pour importer ses autos chez nous, dont le SUV C10 essayé ici.

Comme la Tesla Model Y, Leapmotor propose une ouverture par téléphone ou avec une carte-clé pour la C10. N’ayant pas envie de paramétrer le smartphone pour quelques jours au volant du SUV, j’utiliserai donc la carte-clé. Pas très pratique, parce qu’il faut impérativement la poser sur le rétroviseur gauche pour (dé)verrouiller la voiture ou ouvrir le hayon électrique. Avant de démarrer, il faut le déposer sur le chargeur à induction. Pour laisser le téléphone se charger sans fil sur cet espace, il faudra donc replacer la carte dans sa poche ou ailleurs… Tout cela est bien compliqué. Mais il paraît que c’est le progrès comme le tableau de bord qui se résume à deux écrans et le volant avec très peu de "boutons" tactiles, à la méthode Tesla. Ainsi même pour régler les rétroviseurs, il faut passer par l’écran central avant d’utiliser les commandes du volant. Une fois bien installé, j’enregistre mes réglages dans un profil baptisé pour l’occasion "Voorkeur 4", "voorkeur" étant un mot néerlandais voulant dire "préférence". La Belgique…

De concert

Étant rompu à l’exercice de la balade en voitures chinoises, je ne suis pas surpris par son haut degré de tutorat. Les aides à la conduite dans la C10 sont omniprésentes. Omnipotentes même. D’ailleurs pour vous aider à comprendre, la place de belle-mère était un siège de coffre extérieur des anciennes voitures et même des attelages hippomobiles où belle-maman (par exemple) était soumise au gré du vent, loin du conducteur ainsi à l’abri des remarques sur sa dextérité au volant ou aux rênes. La paix ! Dans la Leapmotor, la reine mère est sur les genoux du conducteur. "Mets-toi plus à droite. Non, plus à gauche. Tu vas trop vite. C’est pas comme ça qu’on conduit. Mais freine !" Et sa voix a l’agaçant ton aigu des bips tonitruants.

Pour couper tout cela, il faut se rendre dans le menu ADAS de l’écran central, en passant par deux sous-menus. Sauf que… Malgré le profil Voorkeur, elle oublie toutes les préférences dès le redémarrage (NDLR : le lecteur de signalisation ISA doit être réactivé à chaque redémarrage par obligation légale, pas les autres aides). Bref, ça sonne, ça se plaint, ça finit par irriter et énerver, même en respectant le Code de la route avec une conduite anticipative, mais participative. Que font ceux qui ne s’en soucient guère ?

Efficace, mais…

Là où la Chine n’a de leçon à recevoir de personne, pas même de belle-maman, c’est en efficacité énergétique des voitures électriques. La Leapmotor dispose de 69,9 kWh de capacité utile. Cela peut sembler peu, mais avec une consommation moyenne de 17,9 kWh/100 km dans une fourchette entre 14,5 kWh/100 km et 20,1 kWh/100 km en fonction de mes parcours, c’est bien suffisant. Le WLTP annonce 420 km d’autonomie, mais il est possible de faire mieux sur les routes urbaines et à 70 km/h. Sur autoroute, sous un soleil printanier, on n’a pas de mal à approcher les 300 km entre deux charges. Le moteur de 218 ch (160 kW) entraîne les roues arrière avec vaillance et douceur. Même en mode de conduite Eco, le SUV a de l’allant et de l’enthousiasme. D’ailleurs, c’est bien la première fois que je laisse une voiture électrique quasi tout le temps en mode Eco.

Bon, il est temps de charger la bête. Et là, désillusion ! La C10 n’a pas une puissance de charge DC à la hauteur : 84 kW. C’est presque ridicule et même incompréhensible pour une voiture de 4,74 m à l’aise sur autoroute ! Dès lors, la pause sur les longs trajets va souvent dépasser les 45 minutes, voire plus. On est loin de la célérité des Tesla, Škoda ou Kia, par exemple ☹. Et que dire des 6,6 kW en AC pour les charges (vraiment) lentes à la maison.

Sinon, ça marche bien

Pour activer le régulateur de vitesse, il faut passer par la commande de la transmission à droite du volant, en la baissant sur D pour réguler sa progression. Étrange, mais pas inédit dans le monde automobile. En tant que conducteur bien maintenu dans le siège, dans un univers sobre, la C10 est finalement agréable à manier. Elle présente une rigidité supérieure à la moyenne par le positionnement de la batterie partie intégrante de la structure avec une architecture "Cell To Chassis (CTC)" aussi appelée plateforme de type skateboard moins chère à développer et moins lourde. Par ailleurs, Stellantis a été sollicitée pour travailler le comportement. En mettant son nez dans le châssis, les ingénieurs d’Alfa Romeo ont donné du vrai talent à la C10. Elle est confortable et plaisante, même sur les mauvais revêtements, sans avoir recours à des amortissements actifs. Et ça, j’adhère !

Pas d’appairage

Dans un univers similicuir presque orange, la sobriété de l’habitacle n’empêche pas de s’y sentir à l’aise. Surtout à l’arrière où les passagers auront de la place pour leurs jambes. Une bonne habitude des Chinois de veiller au confort de ceux installés sur la banquette. Un cocon pour un SUV au design travaillé et agréable à l’œil, sans être révolutionnaire. La pompe à chaleur permet de profiter de la climatisation sans perdre trop d’autonomie. Par contre, le "made in China" ne permet pas encore de profiter d’Android Auto et d’Apple Car Play. Il faudra se contenter des solutions embarquées, dont Spotify ou Deezer intégrés dans l’infodivertissement maison. Question coffre, il est dépendant de la position de la banquette favorisant le bien-être des jambes. Dès lors, son volume de 435 l n’est pas un record dans la catégorie. Pour le câble, il y a un petit coffre à l’avant, le fameux frunk. Et quand vient le temps de la manœuvre, la caméra de recul indique les centimètres restants avant le bisou avec le mur, l’arbre ou le pare-chocs.

Pas une surprise

À l’abri des taxes trumpiennes, la Leapmotor C10 a bien sûr un tarif concurrentiel sur le marché européen. 37.400 € pour la finition Style et 38.900 € pour la finition Design de notre modèle, sur le marché belge. Moins de 40.000 € pour cette dernière, vous avez un SUV sans odeur de musc, avec tout l’équipement, y compris le toit panoramique, les sièges avant chauffés et ventilés, le volant chauffant, les jantes de 20 pouces, la sono avec 12 haut-parleurs, 5 étoiles EuroNCAP… En France, les prix sont du même ordre : 36.400 € pour la Style moins équipée (pas les sièges chauffants et ventilés ni de hayon électrique par exemple et jantes 18 pouces) et 37.900 € pour le modèle Design testé ici. En Suisse, c’est 37.900 CHF pour la C10 Design et 35.900 CHF pour la C10 Style. Leapmotor profite d’un réseau dense grâce à Stellantis et d’une garantie de 4 ans sur la voiture et 8 ans sur la batterie. Disons que si ce SUV n’était pas trop bavard avec ses systèmes ADAS d’aides, je parlerai même de contraintes, à la conduite et s’il était plus prompt à charger sur les bornes rapides, ce serait – hormis les questions géopolitiques liées à ses origines – un must have. Et notez qu’il existe aussi une C10 hybride…

(Olivier Duquesne – Source : Leapmotor – Pictures : © Olivier Duquesne & Leapmotor)