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Née un 11 mars : Nina Hagen, reggae punk sauce germanique

parStéphane Soupart
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11 Mar 2025 18h02
© Etienne Tordoir

Elle a vu le jour en 1955 à Berlin-Est avant que le mur ne soit érigé. Et elle a toujours aimé ruer dans es brancards…

Avant qu’elle ne parvienne à passer à l’ouest (comme on disait à l’époque), Nina Hagen se voyait comme le poil à gratter d’une République Démocratique Allemande (DDR) qui n’avait pas grand chose de démocratique à offrir à ses citoyens. Elle ne se fait pas prier deux fois pour suivre son père à Hambourg à une époque où il était encore assez facile de prendre la poudre d’escampette.
En 1978, son premier album éponyme se vend à 250.000 exemplaires en Allemagne. Mâtiné d’un soupçon d’anglais de cuisine, ce disque certes désordonné mais superbement excentrique lui permet même d’endosser le rôle (et le maquillage) de grande prêtresse punk d’Outre-Rhin. Avec sa voix de cantatrice démente et ses éructations stridentes, elle se taille une renommée inattendue auprès des fans de Klaus Nomi et obtient même un hit improbable avec "African Reggae" (1979).
Après la dissolution de son groupe, sa carrière solo décolle en 1982. La pythie du punk s’assagit et recourt de plus en plus régulièrement à la langue anglaise. Elle délaisse ses cris d’orfraie pour plonger à corps perdu dans un hard rock sans grand intérêt (1989) avant d'hésiter depuis entre allemand et anglais. Sans jamais plus susciter cependant la sidération hypnotisante de ses débuts. 
A la tête d’une discographie pléthorique d’une vingtaine d’albums, Nina Hagen a mis un peu d’eau dans son vin et s’amuse régulièrement en apparaissant où on ne l’attend pas. En enregistrant par exemple Om Namah Shivay, une collection de chants indiens vendue uniquement sur son site Internet et dont les bénéfices ont permis de réaliser des projets sociaux en Inde. Car, la chanteuse qui n’a jamais eu sa langue en poche est engagée socialement autant que politiquement. Ce n’est pas un hasard si, en furetant dans sa discographie, on découvre un Personal Jesus (2010) ou un Revolution Ballroom (1993).
Evidemment, avec sa voix, elle devait un jour ou l’autre participer à un opéra en bonne et due forme. C’est chose faite depuis cette version décalée de "L’opéra de quat’sous" de Kurt Weill et Bertold Brecht à l’orée des années 2000. Sa prestation est d’ailleurs encensée par les ténors de la musique classique. 
Mais, alternant toujours l’eau et le feu, ces dernières années, Nina Hagen s’est acoquinée autant avec des groupes de métal industriel comme Apocalyptica (pour une reprise de Rammstein) puis nous a prouvé qu’à son âge vénérable le grand écart reste reste encore possible. Aussi incroyable que cela puisse paraître, elle a récemment inscrit à son répertoire des reprises de Over The Rainbow ou des chansons populaires allemandes des années 30. En Allemagne, l’ombre de Marlene Dietrich et de son Ange bleu finissent donc toujours par resurgir.

(AK - Photo : © Etienne Tordoir)


Photo : Nina Hagen en interview à l’hôtel Sheraton de Bruxelles (Belgique)le 15 septembre 1980